Pressions exercées par l'employeur pour signer un avenant : elle justifie la prise d'acte du salarié protégé !
Temps de lecture : 4 min
Un salarié protégé peut refuser une modification de son contrat ou de ses conditions de travail. L'employeur peut alors y renoncer ou saisir l'inspection du travail en vue d'un licenciement. Mais s'il continue à exercer des pressions sur le salarié, ce dernier est fondé à prendre acte de la rupture de son contrat de travail.
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Modification du contrat ou des conditions de travail : l'accord du salarié protégé est indispensable
Lorsqu'un employeur souhaite effectuer une modification du contrat de travail d'un salarié protégé, ou procéder à un changement dans ses conditions de travail, il a l'obligation de recueillir son accord. Cela passe souvent par la signature d'un avenant.
Les conséquences diffèrent selon la réponse du salarié :
- s'il donne son accord, la relation de travail se poursuit selon les nouvelles conditions ;
- s'il refuse, l'employeur peut décider de maintenir les conditions antérieures, ou bien engager une procédure de licenciement à son encontre.
Attention
Le licenciement d'un salarié protégé ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail, qui vérifiera si le refus est justifié, au regard de l'impact du changement envisagé sur son travail ou sur l'exercice de son mandat.
Le fait d'imposer à un salarié protégé une modification de son contrat de travail ou de ses conditions de travail justifie une prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur.
La prise d'acte est également justifiée lorsque l'employeur, malgré le refus du salarié, exerce des pressions à son encontre afin qu'il accepte la modification de son contrat ou de ses conditions de travail.
Illustration récente dans un arrêt rendu par la Cour de cassation le 20 mars 2024.
Modification imposée du contrat ou des conditions de travail : elle justifie la prise d'acte du salarié protégé
Dans cette affaire, un représentant du personnel refuse de signer un avenant prévoyant la mise en place d'un système de géolocalisation pour contrôler son temps de travail, en application d'un accord collectif. Il estime que ce système est de nature à impacter sa rémunération, et qu'il n'était pas le seul moyen possible, pour l'employeur, d'assurer le contrôle du temps de travail.
Son employeur le dispense alors d'activité et le convoque à un entretien préalable dans le cadre d'une procédure disciplinaire, qui sera finalement abandonnée. L'employeur met ensuite en demeure le salarié de reprendre le travail en se conformant au nouveau système de contrôle du temps de travail.
Estimant avoir été victime de pressions et d'intimidations pour signer l'avenant, le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail et saisit le conseil de prud'hommes.
Rappel
Lorsqu'un salarié protégé prend acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur, il doit saisir le conseil de prud'hommes. Si la gravité du manquement est établie, la prise d'acte produit les effets d'un licenciement nul. Dans le cas contraire, elle s'analyse en une démission.
La cour d'appel le déboute de sa demande et qualifie la prise d'acte de démission, estimant que :
- l'employeur est fondé à mettre en place le système de géolocalisation prévu par accord collectif ;
- la baisse de la rémunération en résultant n'est pas suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
Saisie d'un pourvoi, la Cour de cassation censure la décision des juges d'appel. Elle affirme que ces derniers auraient dû rechercher si ces circonstances précédant la prise d'acte étaient susceptibles de caractériser des pressions de l'employeur en vue d'échapper à l'intervention de l'inspection du travail.
Les éléments suivants, relevés par les juges, pourraient caractériser de telles pressions à l'égard du salarié :
- l'employeur l'a convoqué à un entretien préalable et l'a dispensé d'activité, avant de renoncer à la procédure disciplinaire ;
- il n'a pas sollicité l'autorisation de l'inspection du travail suite à ses refus réitérés ;
- au contraire, il l'a mis en demeure de reprendre son poste en respectant le nouveau système de contrôle de son temps de travail.
Pour en savoir davantage sur les obligations de l'employeur liées à la qualité de salarié protégé, les Editions Tissot vous suggèrent leur documentation « CSE ACTIV ».
Cour de cassation, chambre sociale, 20 mars 2024, n°22-13.129 (face à la prise d'acte de rupture du contrat de travail d'un salarié protégé ayant refusé une modification de son contrat ou de ses conditions de travail, les juges doivent rechercher si les circonstances caractérisent des pressions de l'employeur en vue d'échapper à l'intervention de l'inspection du travail)
Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot
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