Expertise pour risque grave : l'audition des salariés ne requiert pas l'accord de l'employeur

Publié le 20/09/2024 à 10:40 dans Comité social et économique (CSE).

Temps de lecture : 3 min

Face à un risque grave constaté dans l'entreprise, le CSE peut décider de recourir à un expert habilité. Ce dernier peut alors interroger les salariés dans le cadre de sa mission. L'accord préalable de l'employeur est-il nécessaire avant de procéder à de telles auditions ?

Recours à une expertise pour risque grave : à quelles conditions ?

Lorsqu'il constate un risque grave, identifié et actuel dans l'entreprise ou l'établissement, le CSE peut décider de faire appel à un expert habilité. 

Important

Pour justifier une expertise, il faut notamment que le risque :

  • entraîne une possibilité sérieuse de préjudice pour les salariés (risque d’accident du travail, de maladie professionnelle, risques psychosociaux, etc.) ;
  • existe dans l'entreprise au jour de délibération du CSE ayant décidé du recours à l’expertise. 

À noter que le risque grave peut avoir été révélé, ou non, par un accident du travail ou une maladie professionnelle ou à caractère professionnel.

La décision de recourir à un expert doit résulter d'une délibération adoptée en réunion plénière du CSE, à la majorité des membres titulaires présents. Le vote porte sur la décision de recourir à un expert, l'étendue de sa mission et le choix du cabinet d'expertise.

Dans le cadre de sa mission, l'expert dispose d'un libre accès aux locaux de l'entreprise. L'employeur doit lui fournir les informations nécessaires à l'exercice de sa mission. Le fait de s'y opposer constitue, pour l'employeur, un délit d'entrave au fonctionnement du comité.

L'expert peut également être amené, pour les besoins de sa mission, à interroger les salariés de l'entreprise. Ces auditions peuvent-elles être effectuées librement ?

La Cour de cassation s'est prononcée pour la première fois sur cette question, dans un arrêt du 10 juillet 2024.

Risque grave : l'expert peut auditionner les salariés sans l'accord de l'employeur

Dans le cadre d'une expertise pour risque grave, l'expert désigné par le CSE, s'il considère que l'audition de certains salariés est utile à l'accomplissement de sa mission, peut y procéder à la condition d'obtenir l'accord des salariés concernés.

L'accord préalable de l'employeur n'est alors pas nécessaire.

Si l'employeur conteste le bien-fondé de ces auditions, il revient au juge d'apprécier leur nécessité au regard de la mission assignée à l'expert habilité par le CSE.

Attention

Cette position ne concerne pas toutes les expertises. En 2023, la Cour de cassation avait adopté une autre position à propos de l’expert-comptable, désigné par le CSE dans le cadre de la consultation sur la politique sociale. Ce dernier ne peut auditionner les salariés qu’à la condition d’obtenir l’accord de l’employeur et des salariés concernés. 

Pour toutes vos questions liées aux expertises, les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « CSE ACTIV ».


Cour de cassation, chambre sociale, 10 juillet 2024, n° 22-21.082 (l'expert désigné dans le cadre d'une expertise pour risque grave, s'il considère que l'audition de certains salariés de l'entreprise est utile à l'accomplissement de sa mission, peut y procéder à la condition d'obtenir l'accord des salariés concernés)

Margaux Berbey

Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot