Licenciement du salarié protégé : quand le statut protecteur survit après la fin de la période de protection
Temps de lecture : 4 min
Le licenciement d'un salarié protégé implique, à peine de nullité, d’obtenir une autorisation administrative de l’inspection du travail. Gare à l’employeur qui tenterait d’user de stratagèmes procéduriers pour détourner cette obligation…
Licenciement du salarié protégé : le motif du refus d’autorisation persiste après la perte du statut protecteur
Candidats, salariés demandant l’organisation des élections professionnelles ou salariés investis de mandats représentatifs, tous bénéficient d’une protection exceptionnelle. Le licenciement de ces salariés protégés ne peut être prononcé sans l'autorisation de l'Inspection du travail, qui vérifie que la rupture du contrat est exempte de tout lien avec le mandat.
L'employeur peut-il toutefois invoquer un motif ayant précédemment donné lieu à un refus d'autorisation pour licencier le salarié à l'expiration de sa période de protection ?
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Licenciement du salarié protégé : le motif du refus d’autorisation persiste après la perte du statut protecteur
Candidats, salariés demandant l’organisation des élections professionnelles ou salariés investis de mandats représentatifs, tous bénéficient d’une protection exceptionnelle. Le licenciement de ces salariés protégés ne peut être prononcé sans l'autorisation de l'Inspection du travail, qui vérifie que la rupture du contrat est exempte de tout lien avec le mandat.
L'employeur peut-il toutefois invoquer un motif ayant précédemment donné lieu à un refus d'autorisation pour licencier le salarié à l'expiration de sa période de protection ?
Dans cette affaire, un employeur avait présenté une demande d’autorisation de licenciement pour motif économique concernant un salarié investi d’un mandat de membre du CE. Cette demande avait été rejetée par l'Inspection du travail.
Le salarié ayant démissionné de son mandat le 11 juillet 2016, il bénéficiait d’une protection contre le licenciement d’une durée de 6 mois, laquelle expirait le 10 janvier 2017.
Le 13 janvier 2017, soit 3 jours après l'expiration de la période de protection, le salarié est licencié pour motif économique. Il conteste son licenciement en justice et en obtient la nullité pour violation du statut protecteur devant les juridictions du fond.
Au soutien de son pourvoi, l’employeur, quant à lui, argue :
- que le refus de l'inspecteur du travail d'autoriser le licenciement économique d'un salarié n'interdit pas à l'employeur de prononcer son licenciement à l'expiration de la période de protection, en raison de la fermeture définitive du site sur lequel il travaillait ;
- qu’en tout état de cause, le licenciement prononcé à l'expiration de la période légale de protection pour des faits identiques à ceux invoqués devant l'autorité administrative et ayant donné lieu à un refus d'autorisation de licenciement n'est pas nul, mais sans cause réelle et sérieuse.
À tort a jugé la Cour de cassation, qui rappelle que le licenciement prononcé à l'expiration de la période légale de protection ne peut être motivé par un motif économique précédemment invoqué devant l'autorité administrative et qui a donné lieu à une décision de refus d'autorisation du licenciement. Un tel licenciement est nul.
Or le salarié a été licencié trois jours après l'expiration de sa période de protection, pour le même motif économique que celui ayant donné lieu à la décision de refus d'autorisation du licenciement par l'inspecteur du travail.
Cela étant, c'est à bon droit que le licenciement du salarié devait être considéré comme nul compte tenu qu’il procédait d'un détournement du statut protecteur.
Licenciement du salarié protégé : vigilance sur les tentations de détournement de procédure
En réponse à cette jurisprudence établie, la vigilance doit être de mise. Ainsi, lorsque la connaissance par l’employeur de faits susceptibles de justifier un licenciement est proche du terme de la protection, la tentation peut être grande d’optimiser les délais en ne convoquant le salarié qu’une fois la période de protection expirée.
Il est acquis qu’un tel raisonnement ne saurait prospérer en justice.
En effet, en agissant de la sorte, l’employeur commettrait un détournement de procédure, fermement condamné par les juges qui sanctionnent, par la nullité, le licenciement du salarié prononcé au terme de la période de protection en raison de faits commis pendant cette période, alors qu'ils auraient dû être soumis à l'Inspection du travail (Cass. soc., 10 février 2010, n° 08‐44.001).
De manière générale, dès lors que la cause réelle et sérieuse susceptible de justifier le licenciement s’est produite durant la période de protection, il paraît préférable, pour l'employeur, de solliciter l'autorisation de l’inspecteur du travail. Le cas échéant, celui-ci se déclarera simplement incompétent.
À la marge, la persistance du comportement fautif du salarié après l'expiration de la période de protection peut justifier le prononcé d'un licenciement sans autorisation administrative, à condition que l'employeur ait eu une connaissance exacte des faits reprochés au salarié commis pendant cette période postérieurement à l'expiration de la période de protection (Cass. soc., 16 février 2022, n° 20-16.171).
Cour de cassation, chambre sociale, 26 juin 2024, n° 23-11.601 (le licenciement prononcé à l'expiration de la période légale de protection ne peut être motivé par un motif économique précédemment invoqué devant l'autorité administrative et qui a donné lieu à une décision de refus d'autorisation du licenciement. Un tel licenciement est nul)
Juriste et Responsable Pôle Droit social chez Wagner et Associés
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