Sortie de crise sanitaire et droit du travail : des mesures provisoires en vigueur jusqu’au 30 septembre
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La loi relative à la gestion de la sortie de la crise sanitaire organise un régime intermédiaire avant le retour des règles de droit commun. Ainsi, à compter du 2 juin et jusqu’au 30 septembre 2021, dans l’intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation du virus, le Gouvernement pourra prendre par décret des mesures de restrictions de circulation, réglementation des rassemblements de personnes, fermeture de certaines catégories d’établissement, subordonner certains déplacements ou l’accès à certaines lieux à un résultat de test Covid-19, justificatif vaccinal, etc. (art. 1).
Jusqu’au 30 juin 2021 inclus, un décret peut interdire aux personnes de sortir de leur domicile entre 21 heures et 6 heures, sous certaines conditions. Mais pour le moment, sauf exception, la loi prévoit qu’à compter du 9 juin, la plage horaire du couvre-feu est comprise entre 23 heures et 6 heures (art. 2).
En droit du travail, plusieurs mesures provisoires mises en place au cours des 12 derniers mois devaient prendre fin au mois de juin. Mais la loi relative à la gestion de la sortie de crise prévoit de maintenir leur application jusqu’au 30 septembre prochain. Cela concerne notamment la prise des congés payés et de jours de repos (RTT), les contrats courts, le prêt de main d’œuvre, les réunions CSE à distance, la médecine du travail.
Sortie de crise : négociation sur la succession des CDD et contrat de mission (art. 8, IX)
Une convention collective ou un accord de branche étendu peut fixer :
- la durée totale du contrat à durée déterminée ;
- le nombre de renouvellement ;
- les modalités de calcul du délai de carence et les cas dans lesquels le délai n’est pas applicable.
A défaut, ce sont les dispositions du Code du travail qui s’appliquent.
Ces règles ont été assouplies au cours de l’été 2020. Vous avez la possibilité de négocier un accord d’entreprise qui permet de :
- fixer le nombre maximal de renouvellement pour un CDD ou contrat de mission. Mais attention, ce nombre ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de votre entreprise ;
- fixer les modalités de calcul du délai de carence entre 2 CDD (ou contrat de mission) ;
prévoir les cas où le délai de carence n’est pas applicable.
Ainsi, l’accord d’entreprise prévaut sur la convention collective (ou un accord couvrant un champ territorial ou professionnel plus large) éventuellement applicable dans votre entreprise.
Ces dispositions provisoires s’appliquent aux contrats de travail conclus jusqu'à une date fixée par l'accord, qui ne peut excéder le 30 juin 2021. La loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire repousse cette date au 30 septembre 2021.
Sortie de crise : le prêt de main d’œuvre (art. 8, X)
Dans le cadre d’un prêt de main d'œuvre à but non lucratif, l'entreprise prêteuse facture à l’entreprise utilisatrice uniquement les salaires versés au salarié, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés à l'intéressé au titre de la mise à disposition (Code du travail, art. L. 8241-1).
En raison de la crise sanitaire, les règles ont été assouplies afin de permettre aux entreprises qui rencontrent des difficultés pour maintenir leur activité en raison d’un manque de main d’œuvre de recourir plus facilement au prêt de main d’œuvre.
Ainsi lorsque l’entreprise recourt à l’activité partielle, les opérations de prêt de main d'œuvre n'ont pas de but lucratif pour les entreprises utilisatrices, même lorsque le montant facturé par l’entreprise prêteuse est inférieur aux salaires versés au salarié, aux charges sociales afférentes et aux frais professionnels remboursés à l'intéressé au titre de sa mise à disposition temporaire ou est égal à zéro. Cette mesure provisoire permet aux salariés en activité partielle de travailler pour une autre entreprise.
Actuellement si vous prêtez un salarié, vous n’avez pas l’obligation de mentionner, dans l’avenant au contrat du salarié prêté, les horaires d'exécution du travail. Mais dans ce cas, vous avez l’obligation de préciser le volume hebdomadaire des heures de travail durant lesquelles le salarié est mis à disposition.
Les horaires de travail sont fixés par l'entreprise utilisatrice avec l'accord du salarié.
Sachez que la convention de prêt de main d’œuvre qui est conclue entre les entreprises (prêteuse et utilisatrice) peut concerner plusieurs salariés.
Ces aménagements devaient prendre fin le 30 juin 2021 mais ce dispositif est également prorogé jusqu’au 30 septembre 2021.
Sortie de crise : négociation sur les congés payés (art. 8, XI)
Actuellement, en raison de la crise sanitaire, un accord d’entreprise (ou un accord de branche) peut imposer la prise de congés payés (CP) et modifier les dates de CP déjà validées en dérogeant aux dispositions prévues par le Code du travail ou vos accords collectifs (accord d’entreprise, convention collective).
Ainsi, un accord collectif peut déterminer les conditions vous autorisant, dans la limite de 6 jours de congés payés, et en respectant un délai de prévenance qui ne peut être réduit à moins d'un jour franc :
- à décider de la prise de jours de congés acquis, y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ils ont vocation à être pris ;
- ou à modifier unilatéralement les dates de prise de congés payés.
Un accord collectif peut également vous autoriser :
- à fractionner les congés sans être tenu de recueillir l’accord du salarié ;
- à fixer les dates des congés sans être tenu d'accorder un congé simultané aux salariés conjoints et partenaires liés par un pacte civil de solidarité travaillant dans votre entreprise.
Ces dispositions provisoires devaient s’appliquer jusqu’au 30 juin 2021. Mais la loi prolonge le dispositif en apportant une modification.
Les périodes de congés peuvent être imposées ou modifiées jusqu’au 30 septembre 2021. Nouveauté de cette loi, le nombre de jours imposés ou modifiés passe à 8 jours de congés payés. Il était de 6 jours jusqu’à aujourd’hui.
Sortie de crise : imposer la prise des jours de réduction de temps de travail et des jours de repos des forfaits jours (art. 8, XI)
Aujourd’hui, également afin de répondre aux conséquences de la crise sanitaire, vous pouvez :
- imposer les dates de prise des jours de RTT indépendamment des dispositions fixées par l’accord collectif applicable à votre entreprise. Cela concerne les jours de repos qui sont posés en principe au choix du salarié ;
- modifier unilatéralement les dates de prise de jours de repos.
Il n’est pas nécessaire d’avoir négocié un accord collectif sur le sujet contrairement aux mesures provisoires relatives aux congés payés.
Il vous revient toutefois de respecter certaines règles :
- un délai de prévenance d’au moins un jour franc ;
- le nombre total de jours de repos pouvant être imposés ou dont les dates peuvent être modifiées ne peut pas être supérieur à 10 jours.
Ces possibilités ne devaient pas s’étendre après le 30 juin 2021. Mais la loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire maintient en vigueur ces dispositions jusqu’au 30 septembre 2021.
Sortie de crise : les réunions avec le comité social et économique (art. 8, XII)
En temps normal, il est possible d’organiser les réunions avec le comité social et économique (CSE) à distance. A défaut d’accord applicable, le recours à la visioconférence est limité à 3 réunions par an (Code du travail, art. L. 2315-4).
Actuellement, le recours à la visioconférence est provisoirement autorisé pour les réunions du CSE et du CSE central. Vous devez préalablement informer les membres du CSE de cette organisation.
Le recours à la conférence téléphonique est également envisageable. La messagerie instantanée est également autorisée sous certaines conditions :
- impossibilité de recourir à la visioconférence ou à la conférence téléphonique ;
- un accord le prévoit.
Sachez qu’il existe toutefois certaines limites. Les membres élus des instances représentatives peuvent, à la majorité de ceux appelés à y siéger, s’opposer au plus tard 24 heures avant le début de la réunion, au recours à la conférence téléphonique ou à la messagerie instantanée lorsque les informations et consultations sont relatives à :
- une procédure de licenciement collectif ;
- la mise en œuvre d’un accord de performance collective ;
- la mise en œuvre d’un accord de rupture conventionnelle collective ;
- la mise en œuvre du dispositif d’activité partielle de longue durée.
Les membres peuvent également s’opposer au recours à la visioconférence pour ces mêmes informations et consultations si la limite de 3 réunions par année civile est dépassée.
Ces dispositions dérogatoires sont temporaires. Elles s’appliquent aux seules réunions convoquées pendant la période d’état d’urgence qui prend fin le 1er juin 2021. La loi repousse l’échéance de ces mesures provisoires au 30 septembre 2021.
Sortie de crise : attributions du médecin du travail (art. 8, XVI)
Pour mieux lutter contre l’épidémie de Covid-19, le médecin du travail peut notamment :
- prescrire, voire renouveler un arrêt de travail en cas d’infection ou suspicion d’infection au Covid-19 ;
- établir un certificat médical qui permet aux salariés vulnérables d’être placés en activité partielle ;
- prescrire et réaliser des tests de détection du Covid-19.
Ces attributions provisoires devaient cesser le 1er août 2021. Mais le médecin du travail pourra remplir ces différentes missions jusqu’au 30 septembre 2021.
La loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire modifie également la date de fin du report possible de certaines visites médicales. Cela concerne :
- la visite d'information et de prévention (VIP) initiale sauf exceptions (travailleurs handicapés, femmes enceintes, travailleurs de nuit, mineurs, etc.) et son renouvellement ;
- le renouvellement de l'examen d'aptitude et la visite intermédiaire pour les travailleurs bénéficiant d’un suivi renforcé sauf pour les travailleurs exposés à des rayons ionisants classés en catégorie A.
Jusqu’à aujourd’hui, ce report concerne les visites dont l’échéance intervient avant le 2 août 2021. Cette date est repoussée au 30 septembre. Le report de la date de la visite peut aller jusqu’à un an après l’échéance soit avant le 30 septembre 2022.
Sortie de crise : abondement du compte personnel de formation (art. 8, XIX)
Les entretiens professionnels « états les lieux » devaient avoir lieu, suite à un premier report, au plus tard le 31 décembre 2020 pour les salariés en poste avant le 7 mars 2014. En raison de la crise sanitaire un délai supplémentaire de 6 mois a été accordé aux entreprises pour organiser ces entretiens.
Ce report concerne les entretiens professionnels qui interviennent entre le 1er janvier 2020 et le 30 juin 2021. Ainsi, ces entretiens professionnels peuvent être reportés, à votre initiative, jusqu’au 30 juin 2021.
La loi de sortie de crise ne prévoit pas de report de date pour l’organisation des entretiens professionnels. Toutefois, la date de l’abondement-sanction du compte personnel de formation (CFP) est reportée.
Pour rappel, l’application de la sanction (3000 euros abondés sur le CPF du salarié) qui concerne les entreprises d’au moins 50 salariés, était suspendue jusqu'au 30 juin 2021. Les abondements au titre des entretiens d’état des lieux auraient dû être versés le 1er juillet 2021, dans les cas où l’entreprise n’aurait pas respecté ses obligations.
La loi relative à la gestion de la sortie de crise neutralise l’abondement-sanction du CPF jusqu’au 30 septembre 2021. Le versement doit être effectué le 1er octobre 2021. Pour les entretiens professionnels « état des lieux » 2020, il y avait 2 possibilités pour justifier de l’accomplissement de vos obligations :
- soit vous appliquez les dispositions de la loi avenir professionnel de 2018 : le salarié a bénéficié des entretiens professionnels tous les 2 ans et d’au moins une formation autre qu’une formation « obligatoire » ;
- soit vous appliquez les dispositions de la loi formation professionnelle de 2014 : le salarié a bénéficié des entretiens professionnels tous les 2 ans et d’au moins de 2 des 3 actions prévues (formation, acquisition d’éléments de certification et progression salariale ou professionnelle).
Sortie de crise : capacité du Gouvernement à légiférer par ordonnance (art. 12)
La loi prévoit également d’autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnances, jusqu’au 31 octobre 2021, des mesures relatives à :
- l’activité partielle de longue durée ;
- l’activité partielle des salariés vulnérables face au Covid-19, ainsi que des salariés parents d’enfants de moins de 16 ans ou d’une personne en situation de handicap, sous certaines conditions, ainsi que des salariés d’associations intermédiaires en CDD d’usage d’insertion.
Loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire, Jo du 1er juin
Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot
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