Nouveaux horaires de travail en raison du couvre-feu : pouvez-vous les imposer aux salariés ?

Publié le 20/01/2021 à 07:15, modifié le 22/01/2021 à 13:09 dans Temps de travail.

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Avec le couvre-feu généralisé à 18 heures, certaines entreprises font le choix de modifier les horaires de travail des salariés, par exemple en les faisant commencer plus tôt le matin ou en réduisant la pause déjeuner. Mais quelles sont exactement vos possibilités en la matière ?

L’employeur a la main pour modifier les horaires de travail

Commençons par une bonne nouvelle : à la différence de la durée du travail, les horaires de travail ne sont pas un élément essentiel du contrat de travail mais relèvent des conditions de travail.

Dès lors, votre pouvoir de direction vous permet en principe d’imposer une modification d’horaires à vos salariés. D’autant que le contexte actuel et le couvre-feu vous aideront à justifier la modification auprès des salariés. Il est donc tout à fait possible par exemple d’avancer la journée de travail des salariés et les faire finir plus tôt.

Attention ne vous réjouissez pas trop vite car ce principe connaît un certain nombre d’exceptions…
La plus incontournable : les horaires de travail ont été contractualisés. Dans ce cas, vous ne pourrez pas imposer une modification d’horaires aux salariés sans leur accord et sans leur faire signer à chacun un avenant.

A vérifier également : est-ce que la modification porte atteinte de manière très importante à la vie personnelle et familiale du salarié et à son droit au repos ? Si oui un refus devient alors légitime. Tel peut être le cas si le changement entraîne des problèmes de transport ou de garde d’enfants, s’il a un impact sur la santé du salarié et ne permet pas un temps de repos suffisant. Il faut donc prendre le temps de faire le point avec chaque salarié pour voir si l’atteinte est vraiment excessive.

Une autre problématique peut se poser : si la modification d’horaires envisagée est conséquente, là aussi un refus est possible. Cela a par exemple déjà été reconnu en cas de passage d'un horaire de jour à un horaire de nuit (ou inversement), ou de passage d'un horaire continu à un horaire discontinu.

Dernière chose à avoir en tête : si votre salarié est protégé (par exemple car il est élu du personnel) il peut refuser une modification. Peu importe la cause de cette modification. S’il refuse la modification, vous n’avez pas d’autre choix que de renoncer à la modification et poursuivre le contrat selon les modalités antérieures. Attention aussi aux salariés à temps partiel, des règles spécifiques existent pour eux.

Important
Si vous n’êtes pas concerné par ces exceptions et que vous procédez à la modification d’horaires, pensez à consulter au préalable le CSE en vertu de ses compétences générales en matière de durée du travail et à informer l’inspection du travail. Vous devez aussi afficher les nouveaux horaires de travail (Code du travail, art. L. 3171-1) et informer les salariés dans un délai raisonnable. Pour que chaque salarié soit bien informé, il est conseillé de formaliser la modification d’horaires par écrit ; vous trouverez un modèle à cette fin dans notre documentation « Modèles commentés pour la gestion du personnel ».

La question de la pause déjeuner

S’il est envisageable de réduire la pause accordée aux salariés pour déjeuner vous devez en premier lieu vérifier qu’aucune disposition contractuelle ou qu’aucun accord collectif ne vous impose une durée particulière de pause.

Si rien n’est prévu sur le sujet, il faut savoir que la loi ne prévoit pas en tant que telle de pause déjeuner. En revanche, il existe un temps de pause qui est généralement inclus dans la pause déjeuner et qui est d’au moins 20 minutes pour tout temps de travail effectif de 6 heures consécutives.

Notez-le
Cette pause de 20 minutes ne peut en aucun cas faire l’objet d’un fractionnement. En effet, elle doit être prise de manière consécutive.

Attention toutefois si vous souhaitez réduire la pause déjeuner de vos salariés à 20 minutes, ce n’est pas sans risque. Dans le cadre de vos obligations en matière de santé au travail, une pause de 20 minutes consacrées à la pause déjeuner peut paraître un peu trop juste. Vérifiez également bien que vos accords collectifs ne prévoient pas une durée minimale.
Par ailleurs, une recommandation ministérielle ancienne préconise un temps de pause déjeuner de 45 minutes dans le cadre d’une journée continue.

Attention, les jeunes travailleurs doivent bénéficier d’un temps de pause plus important. Pour connaître le temps de pause à leur accorder, ou pour toutes vos questions relatives au temps de travail des salariés, nous vous proposons notre documentation « Tissot Social Entreprise ».

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Anne-Lise Castell

Juriste en droit social