Licenciement pour faute : appréciation du comportement du salarié au regard de son passé disciplinaire
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Le non-respect des règles de sécurité peut constituer une faute exposant le salarié à la prise d’une sanction disciplinaire. Le choix de la sanction doit tenir compte de l’absence de passé disciplinaire du salarié.
Sanction disciplinaire : établir la faute du salarié
L’employeur met en place des actions de prévention, d’information et de formation pour préserver la santé et la sécurité des travailleurs. Il doit justifier de la mise en place d’un dispositif suffisant pour prévenir les accidents du travail. En cas de manquement à ses obligations, l’employeur s’expose à des sanctions civiles et pénales.
Par conséquent, suite à l’agissement fautif du salarié, l’employeur peut prendre une mesure pour sanctionner le salarié. L'employeur établit la matérialité des faits et apprécie leur gravité pour déterminer la sanction pouvant être notifiée. Le comportement fautif peut entraîner différentes sanctions : avertissement, blâme, mise à pied, licenciement, etc.
En principe, des manquements graves et répétés aux règles relatives à la sécurité des travailleurs peuvent entraîner un licenciement. Cependant, lorsque le salarié n’a jamais fait l’objet d’une sanction disciplinaire au cours de sa carrière dans l'entreprise, l'employeur doit-il tenir compte de ce contexte dans le choix d’une sanction ?
Sanction disciplinaire : prendre en considération l’absence de passé disciplinaire du salarié
Dans une affaire soumise à la Cour de cassation, un salarié avait été engagé en qualité de responsable du secteur bois le 1er décembre 1990 par la société Moutarde. Son contrat avait été transféré à la société Point P le 22 septembre 1995 puis à la société Distribution matériaux bois panneaux le 1er avril 2009. Le salarié occupait la fonction de vendeur conseil et avait été licencié le 16 novembre 2018 pour faute simple. Il avait saisi la juridiction prud’homale pour contester son licenciement.
L’entreprise soutenait qu’elle avait licencié le salarié en application de son obligation de sécurité. En effet, ce dernier avait utilisé, à plusieurs reprises, une scie à panneau considérée comme un équipement dangereux, alors qu’il n’avait ni la formation, ni l’habilitation pour faire usage de cet outil, et cela malgré la présence d’affichages relatifs aux conditions d’utilisation de la scie. De plus, le salarié n’avait pas utilisé d’équipement de protection individuelle, ni demandé l’assistance d’un magasinier ayant l’habilitation. Le salarié ayant une ancienneté de 27 ans, ne pouvait ignorer la dangerosité de cet outil et avait donc commis un manquement grave aux règles de sécurité.
La Cour de cassation confirme le raisonnement de la cour d’appel qui a écarté l’existence d’une cause réelle et sérieuse de licenciement. S’il est établi que le salarié avait utilisé un équipement sans disposer de la formation et l’habilitation requises, l’employeur doit tenir compte de son passé disciplinaire. En effet, le salarié n’avait jamais fait l’objet d’une sanction et l'employeur ne démontre pas avoir sensibilisé le salarié aux risques encourus par l’usage de cet équipement dangereux. De plus, il existait une distorsion avec la sanction infligée au manager, un blâme, pour non-respect de ces règles de sécurité au sein de l’agence.
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Cour de cassation, chambre sociale, 29 mai 2024, n° 22-18.328 (l’employeur doit apprécier la faute du salarié au regard de son passé disciplinaire)
Juriste en droit social
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