Taux de cotisations AT/MP : dans quel délai contester le compte employeur ?
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La complexité de la tarification des AT/MP est telle que même les juges de la cour d’appel d’Amiens s’emmêlent parfois les pinceaux. Une récente affaire soumise à la Cour de cassation, relative à l’absence de délai de forclusion opposable à une action en contestation du compte employeur, en est la parfaite illustration.
Contestation du compte employeur et délai de forclusion
Dans le cas d’espèce, plusieurs maladies professionnelles avaient été imputées sur le compte employeur de la mauvaise année.
Rappelons, en effet, qu’en vertu de l’article D. 242-6-6 du Code de la Sécurité sociale, c’est l’année de déclaration du sinistre qui commande son inscription sur le compte employeur. C’est ainsi qu’une maladie déclarée en 2011 doit figurer sur le compte employeur de l’année 2011. La société avait donc toutes ses chances d’obtenir gain de cause sur cette question. Mais encore fallait-il mener sa contestation dans les délais impartis.
C’est en juin 2021 que l’employeur a décidé de contester cette mauvaise imputation des maladies professionnelles sur les comptes employeur des années 2010, 2013, 2014, 2015 et 2016, impactant les taux AT 2012 à 2020. Sans surprise, la CARSAT a considéré ces demandes comme étant hors délai et les a rejetées.
Pourtant, selon la cour d’appel d’Amiens (30 juin 2022, n° 22/00946), il n’existe aucun délai de forclusion pour :
- contester l’inscription, au compte employeur, des coûts d’incapacité ;
- ou demander l’inscription de ces coûts au compte spécial.
Pour livrer cette décision inattendue, la cour d’appel se base sur un arrêt de 2022 de la Cour de cassation (2e civ, 7 avril 2022, n° 20-18.310) estimant que « l’employeur est en droit de contester l’imputation des conséquences d’une maladie professionnelle à son compte employeur sans que puisse lui être opposée la forclusion de la contestation du dernier taux de cotisation qui lui a été notifié et sans qu’il ait à attendre la notification des taux à venir ».
Erreurs d’interprétation
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Contestation du compte employeur et délai de forclusion
Dans le cas d’espèce, plusieurs maladies professionnelles avaient été imputées sur le compte employeur de la mauvaise année.
Rappelons, en effet, qu’en vertu de l’article D. 242-6-6 du Code de la Sécurité sociale, c’est l’année de déclaration du sinistre qui commande son inscription sur le compte employeur. C’est ainsi qu’une maladie déclarée en 2011 doit figurer sur le compte employeur de l’année 2011. La société avait donc toutes ses chances d’obtenir gain de cause sur cette question. Mais encore fallait-il mener sa contestation dans les délais impartis.
C’est en juin 2021 que l’employeur a décidé de contester cette mauvaise imputation des maladies professionnelles sur les comptes employeur des années 2010, 2013, 2014, 2015 et 2016, impactant les taux AT 2012 à 2020. Sans surprise, la CARSAT a considéré ces demandes comme étant hors délai et les a rejetées.
Pourtant, selon la cour d’appel d’Amiens (30 juin 2022, n° 22/00946), il n’existe aucun délai de forclusion pour :
- contester l’inscription, au compte employeur, des coûts d’incapacité ;
- ou demander l’inscription de ces coûts au compte spécial.
Pour livrer cette décision inattendue, la cour d’appel se base sur un arrêt de 2022 de la Cour de cassation (2e civ, 7 avril 2022, n° 20-18.310) estimant que « l’employeur est en droit de contester l’imputation des conséquences d’une maladie professionnelle à son compte employeur sans que puisse lui être opposée la forclusion de la contestation du dernier taux de cotisation qui lui a été notifié et sans qu’il ait à attendre la notification des taux à venir ».
Erreurs d’interprétation
La cour d’appel d’Amiens semble avoir omis que la contestation d’un compte employeur (qui sert de base au calcul d’un taux AT) constitue, de fait, une contestation du taux AT. Et que lorsque le taux AT a déjà été notifié, l’employeur ne dispose que de 2 mois pour contester le calcul du taux, et donc les sinistres inscrits sur les comptes employeur et pris en compte dans le calcul dudit taux.
La décision citée du 7 avril 2022 ne précise en aucun cas qu’il n’existe aucune forclusion lorsqu’on conteste une inscription sur un compte employeur, bien au contraire. Il indique simplement qu’il est possible de contester un compte employeur qui impacte des taux AT qui n’ont pas encore été notifiés et ce, même si le premier taux impacté est déjà définitif.
A titre d’illustration, il est possible de contester en octobre 2024 une MP imputée sur le compte employeur 2022. Même si l’employeur est forclos pour contester le taux AT 2024, il ne l’est pas pour contester les taux non encore notifiés mais qui seront impactés par la maladie, à savoir les taux 2025 et 2026. S’il obtient le retrait de la maladie, le taux 2024, définitif, ne sera pas réévalué contrairement aux taux 2025 et 2026 qui seront eux, recalculés à la baisse.
C’est donc en toute lucidité que la Cour de cassation a rappelé que :
- si le délai de forclusion n’était pas opposable à une société qui conteste un compte employeur sans attendre la notification du taux de cotisation ;
- il l’était en revanche à une société qui conteste un compte employeur impactant des taux AT déjà notifiés.
Malheureusement, les confusions de la cour d’appel d’Amiens dans cette affaire ne se sont pas arrêtées là. Pour écarter toute prescription, celle-ci est allée jusqu’à se fonder sur l’article L. 243-6 du Code de la Sécurité sociale précisant que, lorsque la rectification des taux AT résulte d’une décision de justice favorable ultérieure, la demande de remboursement des cotisations AT peut porter sur l'ensemble de la période au titre de laquelle les taux sont rectifiés sans qu’aucune prescription ne puisse être soulevée.
En vertu d’un raisonnement décousu, la cour d’appel avait donc considéré que sa propre décision d’autoriser le retrait des maladies du compte employeur constituait une décision de justice favorable au sens de l’article L. 243-6 précité.
Cet imbroglio dans lequel se sont perdus les juges du fond reflète parfaitement la difficulté d’un tel contentieux, nécessitant non seulement une juridiction spécialisée mais également des juges spécialisés…
Cour de cassation, 2e chambre civile, 17 octobre 2024, n° 22-20.692 (le délai de forclusion de deux mois est opposable à l’entreprise qui conteste un compte employeur impactant des taux AT déjà notifiés)
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