Les conséquences d’une grève peuvent-elles caractériser un risque grave, identifié et actuel justifiant la désignation d’un expert ?
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La notion de risque grave, identifié et actuel : rappels en bref
Le CHSCT qui a disparu le 31 décembre 2019, pouvait demander une expertise au titre d’un risque grave constaté dans l’établissement, lequel est révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle.
Les Editions Tissot vous proposent de télécharger un modèle de délibération relative au recours à un expert agréé/habilité en présence d’un risque grave.
La jurisprudence a dessiné, au fil du temps, les contours de la notion de risque grave, identifié et actuel pour le moins générale.
Ainsi, il a pu être jugé que le risque grave se doit, de prime abord, d’exister au sein de l’entreprise ou de l’établissement. Ainsi, il ne peut être tenu compte, pour son « évaluation », de quelconque critère de probabilité de survenance. Ce risque doit donc être réel et présent.
Néanmoins, le fait que ce risque se doit d’être présent ne justifie pas pour autant que soit écartée la possibilité de recourir à une expertise, au simple motif que les salariés en cause ne sont plus présentement exposés au risque.
Enfin, l’exigence d’identification du risque ne signifie pas que le CHSCT (CSE) se doit d’être en mesure d’en identifier la cause ou encore l’origine.
Dans l’affaire qui nous intéresse ici, le CHSCT d’un centre hospitalier a, par délibération du mois de février 2018, acté de la désignation d’un expert au titre de l'article L. 4614-12 du Code du travail suscité et ce, pour « l'éclairer sur les causes à l'origine du processus de dégradation relevé (…), évaluer le risque toxicologique, de contamination, d'explosion, psychosocial ou routier des agents de service, l'aider à formuler des propositions de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail des agents de service ».
Le centre hospitalier employeur, quant à lui, entend contester cette délibération et ce, aux motifs que cette dernière s’avérait fondée sur un simple constat, non caractérisé, d’un mal être au travail et d’un stress professionnel dénués d’éléments objectifs révélant l’existence d’un risque grave avéré, présent et identifié.
La notion de risque grave, identifié et actuel applicable aux conséquences d’une cessation du travail
Dans le présent arrêt, la Cour précise : « qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, le président du TGI qui a relevé, d'une part qu'il était fait état (…), depuis le 16 octobre 2017, d'une surcharge de travail des agents non-grévistes et encadrants, de stress, d'anxiété, de fatigue physique et morale, de pression psychologique et de harcèlement sur les agents non-grévistes et l'encadrement, d'arrêts maladie des agents grévistes et d'un risque psychosocial très élevé, puis d'une souffrance éthique due à l'impossibilité de respecter les délais d'acheminement (…) en période de sous-effectif ou en périodes récurrentes de trafic important sur les trajets, éléments confortés par une pétition, fit-elle non datée, d'autre part que les actions entreprises par le centre hospitalier pour améliorer les conditions de travail des agents se heurtaient à la tension existante entre grévistes et non-grévistes, a pu en déduire l'existence d'un risque grave, identifié et actuel ».
Par conséquent la Cour confirme la possibilité de considérer les conséquences d’une grève comme génératrices, au regard des éléments produits, d’un risque grave, identifié et actuel ; prenant de surcroît le soin de relever que toute démarche de résolution entreprise par l’employeur n’avait pu aboutir, puisque se heurtant aux tensions existantes entre salariés grévistes et non-grévistes.
Pour en savoir plus sur les expertises pour risque grave ? Les Editions Tissot vous conseillent leur fiche « Faire appel à un expert en santé-sécurité et conditions de travail » qui figure dans leur documentation « Comité social et économique : agir en instance unique ».
Cass. soc., 8 janv. 2020, n° 18-19.279 (la surcharge de travail des salariés non-grévistes et la pression psychologique qu'ils subissent peuvent se transformer en risque grave et ainsi justifier une expertise du CHSCT et désormais du CSE)
De formation supérieure en droit social éprouvée, sur le terrain, par des années d'application quotidienne du droit du travail, des relations sociales et de la négociation collective, j’ai toujours …
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