Licenciement : la perte de confiance est-elle un motif valable ?

Publié le 21/05/2014 à 07:01, modifié le 11/07/2017 à 18:25 dans Licenciement.

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Un employeur peut-il licencier un salarié au seul motif qu’il ne lui fait plus confiance ? Pour licencier, vous devez disposer d’éléments objectifs qui justifient et motivent le licenciement. Ces éléments doivent être mentionnés dans la lettre de licenciement. La perte de confiance est-elle un élément qui peut justifier un licenciement ? La Cour de cassation et le Conseil d’Etat se distinguent…

Perte de confiance : un motif de licenciement qui ne se suffit pas pour la Cour de cassation

La perte de confiance est une notion subjective soumise à l’appréciation de l’employeur.

Pour la Cour de cassation, la perte de confiance ne constitue pas en tant que telle une cause de licenciement, même quand elle repose sur des éléments objectifs.
Pour justifier le licenciement d’un salarié qui a rompu votre confiance, vous devez disposer d’éléments objectifs, extérieurs à cette perte de confiance.

Pour rappel, la lettre de licenciement fixe les limites des litiges quant aux motifs. Il est donc important que la lettre mentionne précisément les griefs reprochés au salarié. Ces éléments à eux seuls justifient et motivent le licenciement.

Notez-le
Une directrice des ressources humaines est licenciée pour faute grave. Son employeur lui reproche, dans la lettre de licenciement, de graves anomalies concernant ses demandes de remboursements de frais. En bref, elle présentait des notes de frais fictives. Pour les juges, ces seuls faits, de la part de la salariée DRH, et de nature à rompre la confiance tant à l’égard de l’employeur que du personnel placé sous sa responsabilité, constituaient une faute grave rendant impossible son maintien dans l’entreprise. Le licenciement disciplinaire avait une cause réelle et sérieuse.

Vous ne pouvez pas vous limiter à la perte de confiance comme motif de licenciement où la Cour de cassation jugera le licenciement sans cause réelle et sérieuse. Pensez que la perte de confiance n’est que la conséquence des faits reprochés.

Perte de confiance : la position du Conseil d’Etat au regard de la charte européenne

La charte sociale européenne reconnait le droit des travailleurs à ne pas être licenciés sans motif valable lié à leur aptitude ou conduite, ou fondé sur les nécessités de fonctionnement de l’entreprise. C’est-à-dire que vous devez avoir un motif qui justifie le licenciement :

  • un motif personnel (absence répétées, insubordination, etc.) ;
  • un motif économique (suppression de poste, fermeture de l’entreprise, etc.).

Les travailleurs licenciés sans motif valable ont droit à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée (indemnité de licenciement).

Au regard de la charte européenne, le Conseil d’Etat considère, dans une décision rendue en février 2014, que le motif de licenciement pour perte de confiance constitue, sous le contrôle du juge, un « motif valable ». La position du Conseil d’Etat se démarque de celle de la Cour de cassation.

Conseil d’Etat, 10 février 2014, n° 358992 (pdf | 5 p. | 59 Ko)

Dans une telle situation et pour éviter tout litige, il est conseillé de respecter la jurisprudence de la Cour de cassation et donc de motiver le licenciement sur des éléments objectifs.
Néanmoins, dans certaines situations, notamment s’agissant des salariés protégés, c’est l’avis du Conseil d’Etat qui sera pris en compte.

Pour en savoir plus sur la jurisprudence « Perte de confiance », les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Droit du travail et sa jurisprudence commentée ».



Cour de cassation, chambre sociale, 9 avril 2014, n° 13–14129 (les faits reprochés, de nature à rompre la confiance tant à l’égard de l’employeur que du personnel placé sous sa responsabilité, constituaient une faute grave)
Conseil d’Etat, 7e et 2e sous-sections réunies, 10 février 2014, n° 358992 (le motif de licenciement pour perte de confiance constitue, sous le contrôle du juge, un motif valable au sens des stipulations de l’article 24 de la charte sociale européenne)