Licenciement disciplinaire : attention au délai pour agir !
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Un de vos collaborateurs a commis une faute et vous souhaitez lui notifier une sanction. Soyez vigilant au délai pour agir ! Une fois écoulé, la sanction notifiée pourrait être automatiquement annulée par les juges. Un point récapitulatif des erreurs à éviter est détaillé ici.
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Licenciement disciplinaire : un délai de 2 mois pour agir
En vertu du Code du travail, « aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà de 2 mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales » (Code du travail, art L. 1332-4).
Pour la Cour de cassation, l’acte d’engagement des poursuites correspond à l’envoi de la convocation à l’entretien préalable de sanction, à la notification de la mise à pied conservatoire, ou en cas de sanction non précédée d’un entretien, à la notification de ladite sanction (Cass. soc., 18 janvier 1995, n° 90-42.087).
Ce délai de 2 mois n’est ni suspendu, ni interrompu par la maladie du salarié, en cas de survenance d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ou encore par l’incarcération du salarié.
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En cas d’arrêt de travail de votre salarié, vous devrez le convoquer pendant ses horaires de sortie mentionnés dans la feuille d’arrêt. Si le salarié ne peut se rendre à l’entretien, il est également conseillé de lui laisser un délai suffisant soit pour se faire représenter, soit pour fournir ses explications éventuelles sur les faits reprochés par écrit.
S’agissant de la notion de connaissance par l’employeur, la Cour de cassation fait preuve d’une interprétation très large : dès lors qu’un supérieur hiérarchique, même non titulaire du pouvoir de sanction, a connaissance des faits fautifs, le délai de 2 mois commence à s’écouler (Cass. soc., 23 février 2005, n° 02-47.272).
Cette connaissance des faits s’entend de l’information exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés au salarié.
En effet, dans certains cas, vous pouvez être amenés au préalable à diligenter une enquête interne ou externe afin de récupérer la preuve des faits reprochés mais aussi leur nature et leur ampleur. Or, le point de départ du délai de 2 mois commence à courir à compter de la réception des résultats complets de l’enquête menée.
Notez le
Dans les faits, il convient de faire preuve de prudence sur la date de connaissance des faits reprochés dans la mesure où la charge de la preuve repose exclusivement sur l’employeur.
Afin d’éviter ce risque, il peut être prudent d’engager la procédure dans les 2 mois suivants la connaissance de suspicions fortes, sachant que vous disposez d’un délai supplémentaire d’1 mois après l’entretien préalable avant de notifier votre sanction définitive.
Licenciement disciplinaire : les exceptions au délai de 2 mois
Le délai de 2 mois à compter du jour où vous avez connaissance des faits fautifs souffre de 2 exceptions :
- en cas de poursuites pénales dans le délai de 2 mois ;
- lors de la répétition de faits fautifs de même nature.
En cas de poursuites pénales
Lorsque des poursuites pénales sont engagées pendant le délai de 2 mois suivant la connaissance par l’employeur des faits fautifs, ce délai est interrompu jusqu’à la décision définitive rendue par la justice.
Notez le
Si les poursuites pénales sont exercées plus de 2 mois après le jour où vous avez eu connaissance des faits fautifs, le délai de 2 mois est écoulé et vous ne pouvez plus vous prévaloir des poursuites pénales.
Lors de la répétition de faits fautifs
De la même manière, si un fait fautif de plus de 2 mois ne peut plus donner lieu à l’engagement d’une procédure disciplinaire, celui-ci peut être pris en considération pour justifier une sanction en cas de faute ultérieure.
Tel est le cas dans une affaire soumise devant la Cour de cassation en date du 15 juin 2022. Un employeur décide d’engager, en mai 2016, une procédure de licenciement à l’encontre d’un de ses salariés. A l’issue de celle-ci, le salarié est licencié pour faute grave, la lettre de licenciement évoquant :
- un usage répété de véhicules de l’entreprise à des fins personnelles sur la période du 26 septembre 2015 au 30 avril 2016 ;
- des commandes de matériaux au seul profit du salarié du 30 novembre 2015 au 18 mai 2016 ;
- des absences injustifiées sur la période du 12 novembre 2015 au 7 avril 2016.
Le salarié, considérant que les faits reprochés datent de plus de 2 mois à compter du jour où son employeur en avait connaissance, décide de contester son licenciement.
La Cour de cassation ne donne pas gain de cause au salarié. Elle considère que les faits antérieurs au 31 mars 2016 (soit 2 mois après l’engagement des poursuites) doivent être considérés comme « des faits fautifs de même nature, manifestant ainsi la persistance d’un comportement fautif ».
Il convient de noter que vous ne pouvez pas utiliser cette exception pour n’importe quel fait fautif. Il est impératif que les faits reprochés soient de même nature.
Cour de cassation, chambre sociale, 15 juin 2022, n° 20.23183 (si aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, ces dispositions ne font pas obstacle à la prise en considération de faits antérieurs à deux mois dès lors que le comportement du salarié s'est poursuivi ou s'est réitéré dans ce délai)
Responsable RH dans une entreprise du secteur du BTP
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