Inaptitude et non reprise du salaire : votre manquement peut justifier une rupture du contrat de travail à vos torts

Publié le 13/01/2025 à 10:51 dans Sécurité et santé au travail.

Temps de lecture : 3 min

L’obligation de reprise du salaire s’impose à vous si, dans le mois suivant la déclaration d’inaptitude d’un salarié, celui-ci n’a été ni reclassé ni licencié. A défaut de reprise, la responsabilité de la rupture du contrat de travail pourrait vous être imputée.

Inaptitude : rappels concernant votre obligation de reclassement et de reprise du salaire

En l’absence de dispense expresse du médecin du travail, la déclaration d’inaptitude d’un salarié vous soumet à une obligation de reclassement.

Ce faisant, il peut arriver que vous vous retrouviez dans l’impossibilité de vous y conformer ou dans l’incapacité de la mettre en œuvre. Auquel cas, le levier du licenciement pourra être actionné.

Vos démarches, qu’elles s’inscrivent dans la voie du reclassement ou du licenciement, doivent aboutir promptement. Car il ne faut pas l’oublier, le Code du travail vous impose de reprendre le paiement du salaire si, à l’issue du mois suivant la constatation d’inaptitude, le salarié n’est ni reclassé ni licencié.

Mais attention, l’obligation de reprendre le paiement du salaire ne suspend nullement votre obligation de reclassement. Celles-ci vont, au contraire, coexister de manière autonome.

De fait, en manquant à l’une d’elle, vous commettez une faute contractuelle qui risque de vous coûter cher. Et pour cause, si la gravité de votre manquement le justifie, vous pourrez être tenu responsable de la rupture du contrat de travail sollicitée par le salarié.

Rappel

Un salarié peut effectivement, grâce à deux dispositifs que sont la prise d’acte de la rupture et la résiliation judiciaire, obtenir la rupture de son contrat aux torts exclusifs de son employeur. Ce qui, en pratique, signifie que cette rupture emportera les effets d’un licenciement injustifié ou, le cas échéant, d’un licenciement nul. Pourvu, toutefois, que les manquements de l’employeur soient d’une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite de la relation de travail.

Inaptitude et non reprise du salaire : elle peut justifier une rupture du contrat de travail à vos torts

Dans une décision rendue le 18 décembre 2024, la Cour de cassation a réaffirmé que la non reprise du salaire pouvait caractériser un manquement suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail d’un salarié.

Présentement, une salariée avait été injustement privée de salaire pendant 6 mois. Le montant des sommes manquantes s’élevant alors à plus de 31 000 €.

La cour d’appel avait, à tort, considéré que ce manquement était « à lui seul insuffisant à justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail » de la salariée. 

Notez le

Dans une décision rendue quelques jours plus tôt, la Haute juridiction avait adopté une solution similaire à l’égard d’un salarié inapte qui, victime de la lenteur de son employeur, avait été maintenu dans une situation d'inactivité forcée.

Précisons, en guise de conclusion, qu’un manquement à votre obligation de reprendre le paiement du salaire ne justifie pas automatiquement une rupture du contrat de travail à vos torts En effet, les juges ont parfois rejeté la prétention du salarié tout en condamnant l’employeur à verser les sommes qui étaient dues.

Illustration

Dans une décision rendue en 2010, la Cour de cassation avait considéré que le manquement de l’employeur n’était pas d’une gravité suffisante dans la mesure où ce dernier :

  • avait rencontré des difficultés pour reclasser le salarié ;

  • et commis son premier manquement en l’espace de 25 années de relations de travail.

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Cour de cassation, chambre sociale, 18 décembre 2024, n° 23-11.507 (le manquement de l’employeur à son obligation de reprendre le paiement du salaire peut caractériser un manquement suffisamment grave justifiant que la résiliation judiciaire du contrat de travail soit prononcée à ses torts)

Portraits Tissot 046 2023 Gilles Piel 2

Axel Wantz

Juriste en droit social et rédacteur au sein des Editions Tissot