Discriminations au travail : une proposition de loi pour développer les tests individuels et statistiques
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Afin de lutter contre les discriminations, une proposition de loi, déposée cet été, prévoit le développement des tests et la publication de leurs résultats.
Le Code du travail instaure un principe général de non-discrimination. Ainsi, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, d'horaires de travail, d'évaluation de la performance, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de motifs discriminatoires interdits.
Parmi les motifs discriminatoires interdits, on peut citer ceux liés à l’origine, au sexe, aux mœurs, à l’âge, à la situation de famille ou de grossesse, aux opinions politiques, aux activités syndicales, etc. (Code du travail, art. L. 1132-1).
La discrimination est également interdite par le Code pénal (art. 225-1).
Malgré cet arsenal juridique, les discriminations sur le marché du travail restent importantes. De plus, cela coûterait cher à l’économie française. En effet, selon un rapport de France stratégie de 2016, en supprimant ces discriminations, on augmenterait, sur le long terme, le PIB entre 4 et 14 %.
Développer les tests statistiques et individuels
Afin d’améliorer le processus de lutte contre les discriminations, la proposition de loi prévoit de développer la pratique des tests de discrimination qui sont :
- les tests statistiques : il s’agit d’adresser à des entreprises des candidatures similaires en les différenciant seulement par un seul critère de discrimination (origine, âge, par exemple) afin de voir comment les entreprises traitent ces candidatures ;
- les tests individuels : afin de mettre en évidence une discrimination subie par une personne, on adresse une candidature similaire à cette dernière mais dépourvue du critère de discrimination.
Mais aujourd’hui, seuls les tests individuels sont admis comme preuve de discrimination ouvrant droit à réparation par le Code pénal puisqu’ils permettent de prouver que la personne subit un préjudice. Ce qui n’est pas le cas des tests statistiques qui se fondent que sur des candidatures fictives.
Pour donner du poids à ces tests statistiques, la proposition de loi prévoit une publication de leurs résultats lorsqu’ils révèlent des pratiques discriminatoires. Ce résultat pourrait être publié après avis d’un comité créé par la proposition de loi (voir ci-dessous).
L’inspection du travail serait également informée. Il lui reviendrait de mettre en demeure l’employeur d’engager la négociation d’un accord visant à prévenir ou corriger les discriminations. A défaut d’accord, l’employeur devrait établir un plan d’action après consultation du CSE dans un délai de 6 mois.
Les éléments devraient être fixés par décret mais la proposition de loi prévoit déjà que l’accord ou le plan d’action devrait :
- déterminer les objectifs de progression ;
- définir les actions qualitatives et quantitatives permettant d’atteindre ces objectifs ;
- évaluer leur coût.
Si l’administration considère les mesures insuffisantes, les résultats des tests seraient publiés, dans des conditions fixées par décret.
La méconnaissance de l’une de ces différentes obligations serait passible d’une amende dans la limite de 0,5 % des rémunérations et gains versés aux travailleurs salariés ou assimilés au cours de l’année civile précédant l’expiration du délai de 6 mois. Ce montant tiendrait compte des efforts constatés, ainsi que des motifs de méconnaissance des nouvelles obligations de l’employeur.
Un service public pour lutter contre toutes les formes de discriminations
Un service public serait chargé de la lutte contre toutes les formes de discriminations. Il aurait comme missions :
- d’informer, conseiller et orienter les personnes souhaitant réaliser des tests individuels de discrimination afin de vérifier s’ils sont victimes de discrimination ;
- de réaliser à la demande de ces personnes, et dans des conditions fixées par décret, des tests individuels ;
- de réaliser ou de financer des tests statistiques selon un programme défini par le Gouvernement et rendre ces résultats publics ;
- d’assister les entreprises visées par des tests statistiques afin qu’elles puissent corriger les situations de discriminations.
Ce service comprendrait un comité composé des représentants des entreprises pouvant être testées (organisations patronales ?), d’un membré désigné par le Défenseur des droits, de personnalités choisies en raison de leur compétence (statistique, juridique, etc.) ainsi que de parlementaires (2 sénateurs et 2 députés). Ce comité serait chargé :
- d’élaborer la méthodologie des tests ;
- de proposer la publication de tout ou partie des résultats des tests.
Aucun agenda n’a encore été fixé pour la discussion de cette proposition de loi. Mais on parle toutefois d’un examen qui pourrait avoir lieu cet automne, voire début 2024.
Pour plus de précisions sur le plan national du Gouvernement contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations liées à l'origine, consultez l’article : Plan national contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations liées à l'origine : les impacts sur le monde du travail. Vous pouvez également télécharger le plan dans son intégralité :
Proposition de loi visant à lutter contre les discriminations par la pratique de tests individuels et statistiques, déposé le 4 juillet 2023 et renvoyé(e) à la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot
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