Vidéosurveillance : rappel des cas dans lesquels l’information des salariés et la consultation du CSE sont requises et leurs conséquences

Publié le 08/11/2021 à 14:55 dans Licenciement.

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Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.

La Cour de cassation a récemment rappelé que les salariés et les représentants du personnel doivent être informés en amont de l’installation d’un dispositif de vidéosurveillance lorsqu’il a pour finalité de contrôler l’activité des salariés. A défaut, l’employeur ne peut pas utiliser les enregistrements obtenus comme moyen de preuve de fautes commises par ses salariés.

Vidéosurveillance : la nécessité de consulter le CSE et d’informer les salariés préalablement à l’instauration d’un dispositif mis en place pour contrôler l’activité des salariés

En qualité d’employeur, vous pouvez contrôler l’activité de vos salariés en application du lien de subordination qui vous lie. Vous êtes toutefois soumis à une exigence de loyauté dans les relations contractuelles, qui vous interdit notamment d’user de stratagèmes pour surveiller vos salariés.

Dès lors que vous mettez en œuvre dans votre entreprise des moyens ou techniques permettant de contrôler l’activité des salariés, vous devez préalablement en informer et consulter le comité social et économique (CSE) (C. trav., art. L. 2312-38) sous peine de commettre un délit d’entrave, qui vous exposera à une peine d’amende de 7500 € (C. trav., art. L. 2317-1).

Vous êtes par ailleurs tenu d’informer chaque salarié préalablement à la mise en place d’un dispositif permettant de collecter des informations le concernant personnellement (C. trav., art. L. 1222-4).

Notez-le
Il n'y a pas d'obligation sur la forme que doit prendre l'information des salariés. Afin de vous en ménager une preuve, nous vous recommandons de leur remettre en main propre une copie d’une note de service affichée sur les panneaux de l’entreprise contre décharge.

Dans une affaire récemment soumise à la Cour de cassation, un salarié avait été licencié pour s’être livré à des pratiques de voyeurisme dans les toilettes pour femmes. Il avait été filmé par un dispositif de vidéosurveillance qui n’avait pas été préalablement porté à sa connaissance, ni à celle du CSE.

La cour d’appel a considéré qu’en dépit des affirmations de la société selon lesquelles le système de vidéosurveillance avait été installé dans un but de sécurisation d’une zone de stockage non ouverte au public et du couloir y donnant accès, les salariés avaient accès au couloir qui desservait les toilettes et les caméras étaient disposées de telle sorte qu'elles permettaient de visualiser les portes des toilettes. Cela lui imposait selon elle de consulter les représentants du personnel et d’en informer les salariés préalablement au moyen d'un avenant au contrat de travail ou d'une note de service.

La Cour de cassation n’est pas d’accord avec la cour d’appel. Elle considère que l’article L. 1222-4 du Code du travail instaurant une condition d’information préalable du salarié concerne les dispositifs de vidéosurveillance permettant le contrôle de l’activité des salariés. Or, la cour d’appel n’ayant pas constaté que le système de vidéosurveillance avait été utilisé pour contrôler le salarié dans l'exercice de ses fonctions, elle ne pouvait en déduire qu’il y avait lieu d’informer les salariés et de consulter les représentants du personnel au préalable.

Vidéosurveillance : impossibilité d’utiliser comme moyen de preuve les enregistrements d’un dispositif de surveillance de l’activité des salariés sans information préalable

L’absence de consultation du CSE et/ou d’information des salariés préalablement à la mise en place d’un dispositif de vidéosurveillance le rend illicite lorsqu’il vise à surveiller l’activité des salariés. Devant la chambre sociale de la Cour de cassation (qui juge notamment des contestations portant sur les licenciements), cela peut avoir pour effet de rendre les enregistrements inadmissibles comme moyen de preuve.

Notez-le
La Cour de cassation a récemment considéré, s’agissant de fichiers issus d’un outil de traçage informatique et d’extraits d’un compte privé sur un réseau social, que des éléments de preuve illicites ne devaient pas nécessairement être écartés des éléments de preuve. Les juges doivent dans ce cas vérifier si l’atteinte portée à la vie personnelle du salarié est justifiée au regard du droit à la preuve de l’employeur.

En l’espèce, le salarié licencié pour des faits de voyeurisme contestait la recevabilité des enregistrements de vidéosurveillance comme élément de preuve des faits qui lui étaient reprochés. Il s’appuyait notamment sur l’absence de consultation du CSE et son absence d’information préalablement à l’instauration du dispositif de vidéosurveillance.

La cour d’appel lui a donné raison. Considérant que l’enregistrement du salarié par le système de vidéosurveillance constituait un mode de preuve illicite, elle a écarté tous les éléments de preuve se rapportant à la vidéosurveillance.

La cour d’appel n’ayant toutefois pas constaté que le système de vidéosurveillance avait été utilisé pour contrôler le salarié dans l'exercice de ses fonctions, la Cour de cassation a considéré qu’elle ne pouvait se déterminer ainsi.
En effet, si le dispositif de vidéosurveillance n’a pas pour finalité de surveiller l’activité des salariés, alors la consultation du CSE et l’information du salarié préalablement à l’instauration du dispositif ne sont pas obligatoires. Les enregistrements du système de vidéosurveillance sont alors recevables.

Cette décision s’inscrit dans la lignée des précédentes. La Cour de cassation impose traditionnellement aux juges de vérifier si le système de vidéosurveillance est utilisé ou non pour contrôler les salariés. Cela conditionne la nécessité d’en informer préalablement les salariés ou non, et la recevabilité des preuves ainsi constituées par les employeurs, qui peuvent le cas échéant permettre de sanctionner les salariés.

Vous devez également respecter d’autres obligations pour mettre en place un dispositif de vidéosurveillance au sein de votre entreprise, qu’il soit utilisé pour surveiller l’activité de vos salariés ou non.

Pour connaître l’intégralité des démarches à effectuer pour installer un dispositif de vidéosurveillance au sein de votre entreprise, nous vous invitons à télécharger notre dossier

Procédure d’installation d’un dispositif de vidéosurveillance / vidéoprotection en entreprise


Cour de cassation, chambre sociale, 22 septembre 2021, n° 20-10.843 (seuls les systèmes de vidéosurveillance utilisés pour contrôler les salariés dans l’exercice de leurs fonctions doivent donner lieu à une information préalable des salariés et des représentants du personnel pour pouvoir servir comme moyen de preuve de faits fautifs commis par des salariés)

Amélie Gianino

Juriste en droit social