Déduction forfaitaire spécifique BTP : le Conseil d’Etat et le BOSS confirment les changements majeurs à venir !
Temps de lecture : 6 min
Contenu ancien
Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.
La déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels, outil majeur pour l’optimisation des paies dans de nombreuses entreprises du BTP, a vu son régime profondément bouleversé par l’arrivée du Bulletin officiel de Sécurité sociale au mois d’avril 2021. Certaines évolutions ont donné lieu à de fortes contestations. Mais le BOSS comme le Conseil d’Etat viennent de confirmer l’application de plusieurs points faisant débat.
La suite du contenu est réservée aux abonnés à l'Actualité Premium
Essayez l'Actualité Premium
À partir de 9,90€ / mois- Déblocage de tous les articles premium
- Accès illimité à tous les téléchargements
Abattement forfaitaire pour frais professionnels : une mobilisation uniquement en cas de frais exposés
Voilà une problématique majeure pour les entreprises utilisant jusqu’alors le mécanisme de déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels. C’est le Bulletin officiel de Sécurité sociale (BOSS) dans sa première version qui a créé l’émoi au sein des entreprises du BTP.
Pourquoi ? Car il est précisé que pour se voir appliquer l’abattement forfaitaire pour frais professionnels, un salarié doit « supporter effectivement des frais lors de son activité professionnelle ». Condition qui ne peut pas donner lieu à un redressement pour les rémunérations versées jusqu’au 31 décembre 2022. Mais pour laquelle un agent de contrôle peut exiger la mise en conformité immédiate à l’occasion de tout contrôle entamé depuis le 1er avril 2021.
Donc, dès lors qu’il est absent une partie du mois, seule la rémunération versée pour le travail réellement accompli peut donner lieu à application de l’abattement. Et si un salarié est absent tout le mois, aucune déduction forfaitaire ne peut être opérée sur son bulletin, peu important qu’un maintien de salaire total ou partiel soit assuré par l’employeur, un organisme de prévoyance ou les caisses de congés payés.
Et autre conséquence de la condition de sujétion à des frais professionnels, le BOSS mentionne que « pour appliquer la déduction forfaitaire spécifique, l’employeur doit disposer des justificatifs démontrant que le salarié bénéficiaire supporte effectivement des frais professionnels ». C’est sur ce point que des organisations patronales ont saisi les juges pour demander l’annulation des développements du BOSS sur la déduction forfaitaire spécifique.
Le Conseil d’Etat a rendu sa décision le 14 mars 2022 en validant le contenu du BOSS. Aux employeurs donc de réfléchir aux modalités à mettre en place pour pouvoir en cas de contrôle communiquer les justificatifs en question. Faute de précision sur la nature de ces justificatifs, on pourrait envisager à notre sens de se contenter d’une attestation sur l’honneur des salariés concernés par laquelle ils témoignent de l’utilisation de leur véhicule personnel, de la prise de repas sur chantiers, etc. Sachant que dans les cas où l’employeur prend en charge directement tous les frais liés à l’activité professionnelle du salarié ou bien dans les cas où l’employeur rembourse au réel tous ces frais sur un mois donné, alors il n’est plus possible de pratiquer la déduction forfaitaire spécifique pour la rémunération brute versée sur ce mois.
Important
Cette condition impérative de sujétion à des frais professionnels impacte donc les rémunérations versées au titre des périodes de congés payés. Faute de travail effectif, ces rémunérations doivent désormais être systématiquement soumises à cotisations sociales sans abattement possible de 10 %. Et cela a des conséquences indirectes pour les entreprises : la hausse des cotisations appelées par les caisses de congés payés du BTP ! La CNETP passe ainsi son taux de cotisations congés payés de 19,55 % à 19,75 % à partir du 1er avril 2022.
Abattement forfaitaire pour frais professionnels : un choix modifiable en fin d’année
Le BOSS a aussi à sa mise en place tranché une question qui faisait débat juridiquement. Un employeur doit-il redemander chaque année à un salarié s’il souhaite continuer à se voir appliquer l’abattement forfaitaire pour frais professionnels ?
Le BOSS se positionne clairement : l’employeur doit chaque année réinformer les salariés concernés des avantages et inconvénients du mécanisme et les consulter pour recueillir leur choix pour l’année à venir. Seules sont dispensées de cette consultation annuelle les entreprises au sein desquelles le recours à la déduction forfaitaire spécifique est prévu par accord d’entreprise ou avis conforme rendu par le CSE.
2022 est la première année d’application de cette obligation de consultation annuelle à partir des règles édictées dans le BOSS. Condition qui ne peut pas donner lieu à un redressement pour les rémunérations versées jusqu’au 31 décembre 2022. Mais pour laquelle un agent de contrôle peut exiger la mise en conformité immédiate à l’occasion de tout contrôle entamé depuis le 1er janvier 2022.
Dans le cas où un accord d’entreprise ou un avis conforme du CSE (ou un avis conforme plus ancien rendu par le CE ou les DP) prévoit la possible utilisation de la déduction forfaitaire spécifique dans l’entreprise, c’est l’employeur qui devient le seul décisionnaire de son application pour un ou plusieurs salariés. Les salariés concernés n’ont pas de droit d’opposition.
Le BOSS vient de repréciser le 11 mars 2022 les modalités du droit d’option appartenant à l’employeur sur l’application unilatérale ou non de la déduction forfaitaire spécifique sur ses salariés. L’employeur a ainsi la possibilité de remettre en cause son choix tous les ans en fin d'année. Donc, pour les rémunérations versées en 2022, l’employeur peut décider d’appliquer ou non l’abattement forfaitaire jusqu’au moment de la réalisation de la DSN portant sur les rémunérations versées en décembre 2022. Cette règle est identique à celle prévue avant l’entrée en vigueur du BOSS.
Attention
En l’absence d’accord d’entreprise ou d’avis conforme des représentants du personnel, comment doit agir l’employeur ne souhaitant plus appliquer la déduction forfaitaire pour un salarié donné ? Peut-il là aussi décider unilatéralement d’arrêter cette application avec la dernière DSN de l’année ? Doit-il au contraire attendre l’année suivant celle au cours de laquelle il a recueilli pour la dernière fois un accord du salarié sur l’application de la déduction forfaitaire spécifique ?
La rédaction actuelle du BOSS nous fait tendre vers la deuxième solution. L’employeur ne souhaitant plus recourir à l’abattement forfaitaire pouvant alors se contenter de ne plus adresser au salarié la consultation annuelle sur la poursuite du recours au mécanisme de l’abattement forfaitaire.
Afin d’interroger vos salariés, les Editions Tissot vous proposent le modèle « Interrogation périodique sur l'application de la déduction forfaitaire spécifique » extrait de la documentation « Social Bâtiment ».
BOSS, dossier « Frais professionnels » chapitre 9, mise à jour du 11 mars 2022 (modalités de renonciation par l’employeur à l’application de la déduction forfaitaire spécifique)
CE, 14 mars 2022, n° 453073 (obligation de justification de l’exposition effective de frais professionnels)
Expert en droit du travail et relations sociales, www.didrh.fr
Auteur des documentations SOCIAL BATIMENT, SOCIAL TRAVAUX PUBLICS et RESPONSABLE ET GESTIONNAIRE PAIE BTP pour les Editions Tissot. Formateur en droit du travail auprès des entreprises et des …
- Activité partielle : confirmation de l’augmentation des taux horaires minimums au 1er novembre 2024Publié le 17/12/2024
- Salaires TP 2025 : les minima conventionnels des cadres à compter du 1er janvierPublié le 17/12/2024
- PPV 2024 : une seconde prime peut être versée en bénéficiant des mêmes avantagesPublié le 17/12/2024
- Salaires minimaux du bâtiment et des travaux publics : les modifications de la semainePublié le 17/12/2024
- Social BTP : les mesures à ne pas rater en décembre 2024Publié le 03/12/2024