Cumul d’emplois irrégulier : le dépassement de la durée maximale de travail ne constitue pas en soi une cause de licenciement
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Source d’irrégularité du cumul d’emplois, le dépassement de la durée maximale du travail ne justifie pas à lui seul le licenciement du salarié. Par une récente décision, la Cour de cassation vient de rappeler les circonstances pouvant motiver une telle rupture du contrat de travail.
Le dépassement de la durée maximale de travail : cause d’irrégularité du cumul d’emplois
Par principe, un salarié est en droit d’accomplir simultanément plusieurs emplois, et ce, de manière régulière ou occasionnelle. De même, sauf clause contraire dans le contrat de travail ou dans la convention collective, ce dernier n’est pas tenu de recueillir votre acceptation ou de vous en informer.
Pour autant, cette liberté n’est pas absolue, différentes réserves demeurent à respecter.
Le salarié doit notamment veiller à ne pas méconnaître les dispositions relatives aux durées maximales de travail. Pour rappel :
la durée quotidienne maximale de travail est fixée à 10 heures (sauf exceptions) ;
la durée hebdomadaire maximale de travail est fixée à 48 heures sur une semaine et à 44 heures sur une période de douze semaines consécutives (sauf exceptions).
Sont toutefois exclus de cette interdiction :
les travaux d'ordre scientifique, littéraire ou artistique et les concours apportés aux œuvres d'intérêt général, notamment d'enseignement, d'éducation ou de bienfaisance ;
les travaux accomplis pour son propre compte ou à titre gratuit sous forme d'une entraide bénévole ;
les petits travaux ménagers accomplis chez des particuliers pour leurs besoins personnels ;
les travaux d'extrême urgence dont l'exécution immédiate est nécessaire pour prévenir des accidents imminents ou organiser des mesures de sauvetage.
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D’autres facteurs peuvent également empêcher le salarié de cumuler plusieurs emplois :
la méconnaissance de son obligation de loyauté traduite par l’exercice d’activités concurrentes ;
la violation de sa clause d’exclusivité.
Le dépassement de la durée maximale du travail rend donc le cumul d’emplois irrégulier. Une mesure de licenciement peut alors être envisagée dans certaines circonstances. Celles-ci viennent d’être rappelées par la Cour de cassation.
Rappel des faits
Un salarié, présent dans l’entreprise depuis 1994, est licencié en juin 2018 pour faute grave. Il lui est notamment reproché d’avoir cumulé plusieurs emplois. En effet, parallèlement à sa fonction d’exploitant industriel qualité, ce dernier avait travaillé, entre 2017 et 2018, en tant que chauffeur de bus. Or, son employeur, non informé de cette situation, l’avait appris au cours du mois de mars 2018.
Ce dernier conteste la rupture de son contrat de travail, selon lui dépourvue de cause réelle et sérieuse.
Il est toutefois débouté en appel. La cour d’appel considère que ce cumul d’emplois, non porté à la connaissance de l’employeur, avait amené le salarié à méconnaître :
les règles relatives aux durées maximales de travail ;
son l’obligation de sécurité faisant courir un risque aux autres salariés.
De ce fait, elle considère que son licenciement était justifié. La Cour de cassation va cependant contredire cette solution.
Le dépassement de la durée maximale de travail : insuffisant à lui seul pour justifier un licenciement
Les juges motivent leur décision sur la base de différentes jurisprudences préexistantes.
Ils rappellent ainsi que, dans le cadre du cumul d’emplois, le salarié commet une faute de nature à justifier son licenciement uniquement :
s’il refuse de régulariser sa situation ;
ou s’il refuse de transmettre à son employeur les documents lui permettant d’apprécier le respect des durées maximales de travail.
Le seul dépassement de l’une de ces durées ne constitue pas, en soi, une cause de licenciement.
Appliquées au cas d’espèce, la Cour de cassation constate que le salarié avait :
rempli une attestation de double emploi en mars 2018 ;
rempli des demandes d’autorisation, accordées par l’employeur, à compter de mars 2018.
Elle en déduit donc que le salarié avait transmis à l’employeur les documents lui permettant de vérifier le respect des durées maximales de travail et que la situation irrégulière avait disparu à la date du licenciement.
En conséquence, l’employeur ne pouvait valablement procéder à son licenciement.
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Cour de cassation, chambre sociale, 19 avril 2023, n° 21-24.238 (la seule circonstance que, du fait d'un cumul d'emplois, un salarié dépasse la durée maximale d'emploi ne constitue pas en soi une cause de licenciement. Seul le refus du salarié de régulariser sa situation ou de transmettre à son employeur les documents lui permettant de vérifier que la durée totale de travail n'excède pas les durées maximales quotidiennes et hebdomadaires constitue une faute)
Juriste en droit social et rédacteur au sein des Editions Tissot
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