Conventions collectives : un DRH privé du pouvoir de licencier peut-il être cadre dirigeant ?
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Le statut de cadre dirigeant est encadré par le Code du travail, qui prévoit plusieurs critères cumulatifs. Mais certaines conventions collectives ajoutent leurs propres critères. Pour éviter tout contentieux, l'employeur doit vérifier que le salarié auquel il souhaite appliquer ce statut remplit bien toutes les conditions posées.
Conventions collectives : un DRH qui manque d'autonomie pour avoir la qualité de cadre dirigeant ?
En 2010, un salarié avait été embauché en qualité de directeur des ressources humaines et de la communication interne. La relation de travail était soumise à la convention collective du personnel des institutions de retraite complémentaire et de prévoyance.
Après son licenciement en 2017, le salarié a saisi les prud'hommes. Il réclamait notamment le paiement d'heures supplémentaires et de rappel de salaire pour heures travaillées pendant ses congés. En effet, selon lui, c'est à tort que son employeur lui avait appliqué une durée du travail forfaitaire en le faisant relever de la catégorie « cadre dirigeant ».
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Les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions relatives à la durée du travail, aux repos et aux jours fériés. L'employeur n'est pas tenu de décompter leur durée de travail, ni de rémunérer en heures supplémentaires celles qui sont effectuées au-delà de 35 heures par semaine.
Pour écarter la qualité de cadre dirigeant, le salarié s'appuyait sur les dispositions conventionnelles définissant ce statut (article 2-3 c de l'annexe VII). Parmi les critères exigés, « une large autonomie de décision au moyen de délégations », critère que le salarié estimait ne pas remplir de par ses fonctions. En effet, il n'avait pas de délégation de pouvoir générale mais seulement des subdélégations, et il n'avait pas non plus le pouvoir de licencier.
Conventions collectives : le statut de cadre dirigeant nécessite plusieurs critères cumulatifs
Devant les juges d'appel, le salarié n'avait pas eu gain de cause.
La donne est différente devant la Cour de cassation.
Celle-ci commence par rappeler la définition du cadré dirigeant donnée par le Code du travail (art. L. 3111-2), une définition qui implique que seuls relèvent de cette catégorie les cadres participant à la direction de l'entreprise.
Puis la Cour rappelle les dispositions conventionnelles applicables, qui exigent que les cadres dirigeants répondent simultanément aux trois critères suivants :
- ils jouissent d'une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps ;
- ils bénéficient, dans le cadre des orientations données par le conseil d'administration de l'institution, d'une large autonomie de décision au moyen de délégations qui leur permettent d'engager, de manière substantielle, le fonctionnement de l'institution ;
- leur classification dans la convention collective nationale est au moins égale à la classe 8 niveau D, et leur rémunération se situe de surcroît dans les niveaux les plus élevés du système de rémunération de l'institution.
Conventions collectives : un DRH qui doit en référer à son directeur général n'est pas cadre dirigeant
Dans cette affaire, pour rejeter la demande du salarié, les juges d'appel avaient relevé que :
- même si les courriers de convocation aux entretiens et les lettres de licenciement étaient signées du directeur général, le salarié DRH menait systématiquement les entretiens préalables. Ils en avaient conclu que le salarié, qui était, entre autres missions, chargé de la gestion du personnel, avait la responsabilité des procédures de licenciement ;
- le salarié avait toute latitude pour définir le quantum des provisions sur risque lié aux licenciements effectués, quand bien même il en référait à son directeur général qui validait les chiffrages effectués ;
- le conseil d'administration avait donné au directeur général, délégation de pouvoirs avec faculté de subdéléguer et qu'à ce titre, le salarié bénéficiait de subdélégations pour procéder à la signature des contrats de travail et de leurs avenants, à l'engagement de diverses dépenses incluant le paiement des salaires.
Enfin, les juges avaient relevé que le salarié s'était vu confier des responsabilités de direction des ressources humaines et de la communication dont l'importance impliquait une grande indépendance dans l'organisation de son emploi du temps et qu'il percevait une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés de l'entreprise.
A partir de tous ces éléments, les juges d’appel avaient conclu que le salarié avait bien la qualité de cadre dirigeant.
A tort pour la Cour de cassation, qui souligne que le salarié bénéficiait, de la part du directeur général, seul titulaire des délégations de la part du conseil d'administration, de subdélégations et qu'il devait, en dépit d'une grande autonomie dans l'exercice de ses fonctions, en référer au directeur général. De plus, il ne signait ni les lettres de convocation à l'entretien préalable, ni les lettres de licenciement. Les juges du fond auraient donc dû en déduire que le salarié n'avait pas la qualité de cadre dirigeant.
Cour de cassation, chambre sociale, 15 mars 2023, n° 21-21.632 (sont considérés comme cadres dirigeants les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement. Ces critères cumulatifs impliquent que seuls relèvent de cette catégorie les cadres participant à la direction de l'entreprise.)
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