Si le salarié exerce son droit de retrait, son salaire est-il maintenu ?

L'exercice du droit de retrait, s'il est légitime (le salarié a un motif raisonnable) ne peut pas entraîner de retenue de salaire. Le salarié percevra donc la totalité de son salaire pendant toute la durée de l'exercice de son droit de retrait, comme s'il avait continué à travailler. En outre, il ne lui sera pas appliqué de sanction disciplinaire du fait de cette décision. Le salarié qui analyse mal la situation de danger ne commet pas pour autant une faute pouvant entraîner une sanction, s'il pouvait raisonnablement croire qu'il y avait danger.

L’appréciation du motif raisonnable s’effectue au moment où le droit de retrait est exercé. Peu importe qu’un tel danger existe ou non, le juge doit vérifier si le salarié avait un motif raisonnable pour le penser au jour où il se retire. Par exemple, dans le cas d’un salarié steward, le juge doit rechercher si ce dernier avait un motif raisonnable de penser, à la date de l'exercice de son droit de retrait en raison d’un conflit international et du survol de la zone par sa compagnie aérienne, que la situation de travail présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé, indépendamment de l'existence d'un tel danger, justifiant l'exercice du droit de retrait.

Le fait que l’employeur ait respecté toutes les dispositions légales et réglementaires visant à protéger la santé et la sécurité des salariés est sans incidence sur la légitimité de l’exercice du droit de retrait : celle-ci ne consiste pas à rechercher si l’employeur a commis un manquement mais à déterminer si, au moment de l’exercice de ce droit, le salarié avait un motif raisonnable de penser que sa situation de travail présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

Si l'employeur le licencie alors que l'exercice du droit de retrait était permis, le licenciement est déclaré nul et le salarié devra être réintégré dans ses fonctions.

Dans une affaire datant du 9 mai 2012, n° 10-27.115, des salariés invoquaient l'exercice de leur droit de retrait dans le cadre d'un mouvement de grève. Ils estimaient que l'employeur devait payer leurs salaires pendant ces périodes de suspension du contrat de travail. Les juges ont décidé que les salariés n'étaient pas en présence d'un danger grave et imminent justifiant l'exercice du droit de retrait, en conséquence l'employeur n'avait pas à payer les jours de grève.

Attention, cependant, le droit de retrait ne peut s'exercer que pendant l'exécution du contrat de travail. Ainsi lorsqu'il est suspendu pour cause de maladie, il ne peut être exercé (Cass. soc., 9 octobre 2013, n° 12-22.288).

De même, le droit de retrait n'est pas admis en cas de risque persistant ou de danger potentiel, ou encore lorsque la situation de danger a cessé.

De même, le fait que l’employeur n’ait pas remis au salarié un tee-shirt et un pull destinés à être portés sous les équipements de protection individuelle qui, eux, ont été fournis (veste et pantalon de protection) ne constitue pas une situation de danger grave et imminent : le salarié peut être alors sanctionné.

La retenue sur salaire peut être parfaitement opérée par l’employeur dans la même temporalité que l’exercice du droit de retrait. La démarche de l’employeur n’est pas suspendue à la saisine préalable du juge.