Suivi de l'état de santé des salariés : le ministère du Travail remanie son questions-réponses

Publié le 23/09/2024 à 18:00, modifié le 24/09/2024 à 10:49 dans Sécurité et santé au travail.

Temps de lecture : 6 min

Le ministère du Travail a décidé de remanier son questions-réponses dédié au suivi de l’état de santé des salariés. Une thématique qui demeure sujette à de nombreuses interrogations de la part des SPST, des employeurs et des salariés. Décliné en cinq volets et doté d’un tableau de synthèse, ce nouveau Q-R n’a néanmoins pas été bouleversé dans son contenu. 

Compétences des professionnels de santé au travail

Plusieurs précisions intéressantes sont formulées par le ministère du Travail dans le cadre de cette première salve de questions.

S’agissant, de prime abord, des fonctions dévolues au collaborateur médecin. Dans la mesure où celles-ci sont identiques à celles conférées au médecin du travail, le questions-réponses indique que toutes les occurrences « le médecin du travail », présentes dans le Code du travail, doivent s’entendre comme « le médecin du travail et le collaborateur médecin ». 

Rappel

Le collaborateur médecin est un médecin non spécialiste en médecine du travail et engagé dans une formation en vue de l'obtention de cette qualification. Il exerce les missions que lui confie le médecin du travail dans le cadre d’un protocole écrit et validé par ce dernier.

Concernant, d’autre part, les internes en médecine du travail, le questions-réponses rappelle que ces derniers peuvent émettre des avis. Mais il conditionne toutefois cette délégation à l’obligation de mentionner, clairement, le nom du médecin du travail maître de stage. Et pour cause, un interne n’est ni docteur en médecine, ni inscrit à l’ordre des médecins. 

Le cas des médecins praticiens correspondants (MPC) est également envisagé par la suite, et ce, de manière inédite. Pour mémoire, le MPC est un médecin qui, bien que non spécialisé en médecine du travail, dispose d’une formation en santé au travail. Aussi, il est amené, dans le cadre d’un protocole de collaboration, à intervenir dans le suivi individuel de l’état de santé du salarié, exception faite du suivi individuel renforcé (SIR). 

Important

La conclusion d’un protocole de collaboration n'est autorisée que dans des zones caractérisées par un nombre insuffisant ou une disponibilité insuffisante de médecins du travail pour répondre aux besoins du suivi médical des travailleurs.

Plusieurs points sont alors développés. L’impossibilité, tout d’abord, pour le MPC de cumuler sa fonction avec celle de médecin traitant de « salariés suivis dans le cadre de sa collaboration ». Le constat, ensuite, que la mise en œuvre de ce dispositif reste à ce jour suspendue à la parution d’un arrêté : 

  • définissant le modèle du protocole de collaboration ;
  • déterminant les montants minimaux et maximaux de la rémunération due au MPC.

Visites d’information et de prévention (VIP)

Le volet relatif aux visites d’information et de prévention (VIP) offre également son lot de précisions. 

Rappel

La visite d’information et de prévention est destinée aux salariés faisant l’objet d’un suivi individuel simple (SIS) ou d’un suivi individuel adapté (SIA).

Dans un premier temps, il est intéressant de noter que le ministère du Travail explicite la formulation « orientée sans délai vers le médecin du travail ». Réservée à l’hypothèse dans laquelle un professionnel de santé, autre que le médecin du travail, réaliserait la VIP, elle signifie : 

  • qu’un rendez-vous avec le médecin du travail doit être immédiatement programmé dans les meilleurs délais ;
  • mais aussi que ce rendez-vous peut avoir lieu immédiatement après le rendez-vous initial.

Sur le sujet, plus technique, de l’exposition des salariés aux agents biologiques du groupe 2, le Q-R indique qu’il n’existe pas de liste répertoriant les métiers exposant spécifiquement à ces agents. Il est néanmoins précisé qu’ils peuvent se retrouver dans les secteurs suivants : tri des déchets, travail dans le milieu agricole, travail au contact d’animaux, laboratoire d’anatomie pathologique, personnel d’entretien et de maintenance, etc. Pour rappel, ces agents sont à l’origine de maladies telles que la grippe, la gastroentérite ou encore l’hépatite A.

Spécificités du suivi individuel renforcé (SIR)

Rappelons-le, tout salarié affecté à un poste de travail présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité, ou pour celles de ses collègues, bénéficie d’un suivi individuel renforcé de son état de santé. Lequel emporte, notamment, l’organisation d’un examen médical d'aptitude qui se substitue à la VIP. Une liste des postes présentant de tels risques doit être arrêtée par l’employeur.

Le Code du travail exprime, en des termes succincts, l’idée que sont concernés par le SIR les salariés dont le poste de travail est soumis à la réalisation d’un examen d'aptitude spécifique. A travers son questions-réponses, le ministère du Travail décline les postes qui, en l’état actuel des textes, sont concernés par cette disposition. A savoir notamment : 

  • les postes occupés par les jeunes travailleurs affectés à des travaux réglementés (ex : exposition à la poussière d’amiante, travaux en hauteur) ;
  • les postes soumis à autorisation de conduite pour l’utilisation de certains équipements de travail mobiles ou servant au levage (ex : grues mobiles, grues à tour, engins de chantier) ;
  • les postes occupés par des travailleurs habilités pour effectuer des opérations sur les installations électriques ou dans leur voisinage.

Le ministère du Travail précise, par ailleurs, que même si le médecin du travail décide de réorienter un salarié vers un suivi individuel renforcé, il ne lui appartient pas de compléter la liste des postes à risques. La fixation de cette liste relève de la seule compétence de l’employeur.

Toujours sur le thème de la liste des postes à risque, il est signalé, s’agissant des entreprises de moins de 11 salariés dépourvues de représentants du personnel, que l’employeur doit la constituer après avoir recueilli le seul avis du médecin du travail. 

Autres visites et examens

A travers cette quatrième  série de questions, le ministère du Travail s’intéresse à la visite médicale de préreprise et réaffirme sa position selon laquelle cet examen « ne peut donner lieu à la constatation d’une aptitude ou d’une inaptitude ». 

Notez le

Une incertitude demeure néanmoins vis-à-vis de cette affirmation. La Cour de cassation ayant considéré, en mai 2023, qu’une inaptitude pouvait être constatée à l’occasion d'une visite médicale réalisée à la demande du salarié pendant la suspension de son contrat de travail pour maladie.

Pour consulter la totalité du questions-réponses, et notamment la partie relative à l’inaptitude et ses suites, rendez-vous sur le site du ministère du Travail.

Pour en savoir davantage sur le suivi de l’état de santé des salariés, les Editions Tissot vous suggèrent leur documentation « Santé sécurité au travail ACTIV » dans laquelle vous pourrez retrouver la procédure interactive « Organiser les visites médicales auprès des services de prévention et de santé au travail ». 

Questions-Réponses relatif au suivi de l’état de santé des salariés, ministère du Travail, 17 septembre 2024

Portraits Tissot 046 2023 Gilles Piel 2

Axel Wantz

Juriste en droit social et rédacteur au sein des Editions Tissot